Texte du dissident Russe Vladimir Boukovski, écrit dans Un jugement à Moscou , en réfléchissant à la chute des régimes totalitaires nazi et communiste et à la manière dont ils ont été jugés moralement et politiquement :
« Trouvant en elle-même assez de courage pour tenir tête au mal, l’humanité puisa aussi en elle-même assez d’honnêteté pour regarder au fond de son coeur et condamner toutes les manifestations d’esprit collaborationniste [vis à vis du nazisme], pour douloureuse que fût l’opération. C’était plus facile pour des vainqueurs, qui avaient de quoi se vanter et qui avaient moralement le droit de juger ceux qui avaient capitulé.
Le procès de Nuremberg n’est pas irréprochable, il prête à critique, mais il a accompli une oeuvre grandiose : il a restauré des normes morales absolues de conduite humaine ; il a rappelé à un monde désorienté le principe fondamental de notre civilisation chrétienne – la liberté de choix, qui entraîne la responsabilité personnelle devant ce choix. En une époque de folie généralisée et de terreur de masse, il a confirmé cette vérité simple, connue depuis les temps bibliques et égarée dans le magma sanglant du XXe siècle : ni l’opinion de la majorité autour de nous, ni les ordres des chefs, ni la menace de mort ne sauraient nous dégager de cette responsabilité (morale personnelle).
Ce qui se produit aujourd’hui est exactement le contraire de Nuremberg. Le monde d’aujourd’hui n’a pas lieu de se vanter. Il n’a pas trouvé en lui-même assez de courage pour tenir tête au mal [communiste] ni assez d’honnêteté pour se l’avouer.