Islamophobie ou islamophilie : L’islam dans l’enseignement de l’histoire.

Les polémiques actuelles sur une vidéo et des caricatures critiquant l’Islam et Mahomet ou L’agression d’un professeur d’histoire de Bordeaux après un cours évoquant l’islam reposent la question de la présentation de l’islam dans les écoles françaises. La victime de cette agression demande plus de laïcité et plus de connaissances. On peut surtout souhaiter trouver plus d’histoire sur le sujet dans les manuels scolaires.
Représentant l’opinion moyenne des professeurs d’histoire, ils n’osent généralement pas critiquer l’islam, font des éloges un peu vagues de la civilisation musulmane, mais ne savent par faire comprendre la culture arabo musulmane.

La peur d’offenser ou de froisser les élèves musulmans peut conduire les manuels à surévaluer la tolérance de l’islam et à écrire des phrases telles que : « Les ottomans instituent le devchirme créant une voie d’ascension sociale au service de l’Etat. Celui-ci consiste à prélever … des enfants chrétiens. A la différence de la règle générale les recrues sont converties de force à l’islam … [et] sont ensuite formées au métier des armes pour constituer les redoutables janissaires.»  (Histoire Fabriquée?, p42)
Il s’agit ici pour les nouveaux manuels de seconde d’atténuer l’impression de “choc de civilisation” produite par un nouveau programme de seconde qui ne présente l’Islam que dans un moment de conflit; quand les Turcs Ottomans prennent Constantinople en 1453.
L’oubli de la critique historique.
Le nouveau programme de cinquième demande aussi une “contextualisation des débuts de l’Islam” à partir de “sources historiques” et des textes musulmans qui doivent être “datés en relation avec ce contexte”. Les manuels n’ont pas osé aller réellement dans cette direction et en restent souvent au récit musulman traditionnel de la vie de Mahomet.

Alors, que faire?
Poser des questions historiques sans blesser des convictions.
L’histoire ne sait pas tout du passé de manière précise. Montrer quel est l’espace d’incertitude qui voile certains aspects des débuts de l’islam est possible et nécessaire. Pour le faire sans blesser inutilement, il faut rappeller que l’histoire pose des questions sur le passé, quand la religion adhère à un message insèré dans une histoire. La tradition musulmane a gardé des traces des débats entre les premiers musulmans à propos de la bonne version du Coran ou des récits de la vie de Mahomet rédigés à la fin du IIe siècle après le début de l’islam. Le livre “L’histoire fabriquée?” donne la parole aux recherches actuelles, par exemples celles sur les premiers grafitis musulmans du “Coran des pierres”. Il le fait en gardant à l’esprit qu’il s’agit de poser des questions sur cette histoire, sans apporter de conclusions définitives. (Histoire fabriquée? pp 39-42)
Retrouver une histoire précise qui donne la juste mesure de l’apport de la civilisation du temps des Califes dans les progrès des sciences, en particulier en mathématiques. Cela permettrait d’éviter que certains élèves croient de bonne foi que les musulmans auraient “inventé la médecine” ou “les mathématiques” et que d’autres croient à l’inverse que les progrès des sciences en terre sous autorité musulmane seraient une idée reçue sans fondement.
Savoir découvrir une culture différente.
Les programmes, et la culture scolaires actuelles ne permettent pas non plus de parcourir les cours d’un palais musulman comme l’Alhambra en écoutant ce qu’en disent les calligraphies qui en ornent les murs.
« Le fond du bassin évoque une masse de glace d’où l’eau s’écoule comme un solide au mouvement figé. Du bord de la fontaine, le flot ruisselle vers de longs canaux – larmes longtemps retenues échappant à une amante. » (Poème d’Ibn Zamrak, Cour des lions, Alhambra de Grande, cité par Henri Stierlin, L’Alhambra, Imprimerie nationale, 1991) Image.